Mon espace santé : la plateforme patient dont le DMP est devenu une fonctionnalité
Adieu Espace numérique de santé, bienvenue dans Mon espace santé (MES) ! Prévu pour janvier 2022, les assurés sociaux auront finalement reçu au printemps dans leur boîte mail une notification d’ouverture. Dossier médical partagé (DMP) et Dossier pharmaceutique (DP) doivent être à court terme enfin reliés et interconnectés à cette véritable plateforme numérique du patient.
Mon espace santé est l’une des trois plateformes qui forment l’architecture de “la maison du numérique en santé”, avec le Health Data Hub et le futur Bouquet de services pros. Le but : rendre chaque patient davantage acteur de sa santé en lui permettant de sauvegarder dans un coffre-fort numérique l’ensemble de ses données de santé. Il comprendra même à terme un agenda médical alimentable par l’utilisateur et les services autorisés, ainsi qu’un carnet d’adresses de professionnels de santé et des informations partageables à sa discrétion via une messagerie sécurisée de santé (MSS)
DMP : un service socle du numérique en santé
Côté professionnels de santé, MES doit ainsi “favoriser la continuité des soins”. De fait, cet espace numérique du patient est devenu une pierre angulaire de la feuille de route du numérique en santé. Après de nombreuses années d’errements, le DMP va devenir de fait une (simple) fonctionnalité de MES. Avec, comme atout l’interopérabilité, un impératif désormais fixé par l’Agence du numérique en santé à tous les acteurs.
L’accès y est possible aux professionnels d’établissement via dmp.fr. Mais il est prévu qu’ils puissent consulter et alimenter le DMP depuis leur logiciel d’ici la fin de l’année. Rappelons que le “Ségur de la santé” a abouti au déblocage de 2 milliards d’euros pour moderniser les logiciels métiers des soignants (libéraux, hospitaliers et médico-sociaux) pour les rendre ergonomiques, interopérables et compatibles avec MES (donc avec le DMP et les MSS). Le programme de financement SUN-ES (pour “Ségur usage numérique en établissements de santé”) doit permettre la mise à jour des systèmes d’information hospitaliers (SIH) sous réserve de trois exigences : alimenter MES et permettre le partage de documents via le DMP, promouvoir la MSS et associer l’identité nationale de santé (INS) à tout document de santé transmis.
De nouveaux services sont annoncés pour 2023, dont l’alimentation de MES avec des ordonnances structurées et sécurisées, authentifiées par QR code, la visualisation d’imageries médicales, un volet de synthèse médicale par le médecin traitant pour les patients en ALD, et l’alimentation “massive” du dossier médical par les hôpitaux et autres professionnels. Les établissements de santé pourront aussi demander au patient de signer électroniquement un document via la messagerie de MES.
DP : l’atout pharmaceutique
De son côté, le Dossier pharmaceutique (DP), dont l’ouverture automatique pour chaque assuré social était prévue par la loi pour janvier 2022, a été repoussée pour des raisons opérationnelles à l’automne 2022 (l’assurance maladie n’a pas fourni à l’Ordre des pharmaciens, ordonnateur du DP, les coordonnées des assurés sociaux).
Le DP sera aussi interconnecté avec le DMP, et donc MES. A partir du moment où le pharmacien remplira son obligation d’alimenter le DP, le DMP sera automatiquement renseigné avec les traitements du patient. Rappelons en effet que l’art. L1111-23 du code de la santé publique prévoit que “les informations de ce dossier [Ndlr, le DP] utiles à la coordination des soins sont reportées dans le dossier médical partagé”. Et que la loi d’accélération et de simplification de l’action publique du 7 décembre 2020 a modifié le même article du code qui prévoit désormais que “les pharmaciens exerçant dans une pharmacie à usage intérieur consultent et alimentent ce dossier lorsque les systèmes d’information de santé le permettent”.
Et il faut reconnaître que l’Ordre des pharmaciens redouble d’efforts pour inciter aux usages du DP à l’hôpital, qui peinent à se développer en dépit de sa plus-value. Celle-ci a été démontrée par exemple dans la conciliation médicamenteuse, la prise en compte des effets indésirables (y compris en lien avec l’automédication), la complétude des informations en consultation d’anesthésie ou aux urgences… Accessible depuis 2013 en PUI par les pharmaciens des établissements abonnés, et depuis 2017 pour tous les médecins, le DP a vu ouvrir aux PUI ses modules DP-Rappels (de lots) et DP-Alertes (sanitaires), et depuis 2020 le DP-Ruptures (via un accès web). Autre développement pour faciliter les usages, la dématérialisation de la carte Vitale permettant aux professionnels hospitaliers d’accéder au DP durant tout le suivi d’un patient sans lui redemander sa carte. Depuis l’an dernier, cet accès est possible entre établissements d’un même groupe et l’enregistrement d’un patient peut atteindre 365 jours.
Un connecteur DP-DMP pour l’hôpital
Dernière avancée technique présentée aux éditeurs en octobre 2021 : un connecteur DP-DMP qui permet l’intégration à moindre frais dans les SIH avec les principales fonctionnalités : consultation, alimentation, et enregistrement du patient pour dématérialiser la carte Vitale. L’accès peut se faire via la carte de professionnel de santé (CPS) ou un certificat logiciel, soit par API (“Application Programming Interface”), un connecteur intégrable sur poste de travail ou sur serveur, soit par IHM (interface homme-machine), avec une interface web pour la consultation du DP.
Faute d’une intégration au logiciel métier, l’accès au DP-Patient est toujours possible par un navigateur web via le logiciel FAST (pour “Fourniture d’un accès sécurisé aux traitements”). A noter aussi l’accès imminent des biologistes médicaux au DP, dès que le “décret DP” aura enfin été publié.
Rappelons également le lancement prochain par l’Ordre de l’appli Dossier Pharma, application grand public facilitant l’accès au DP. L’occasion d’évoquer un autre élément clé de MES qui intéresse tous les acteurs de la santé (centres hospitaliers, acteurs de la MedTech…) : un catalogue où seront disponibles des solutions et autres applis de confiance. Être référencé dans MES pourrait devenir un véritable sésame pour les solutions de santé.
François Silvan