Magdalena Ponseele, pharmacien responsable de l’UCPC d’Uneos : “Nous pourrons doubler notre production en cancérologie”
La restructuration architecturale des Hôpitaux privés de Metz (Uneos) fin 2020 a donné lieu à la reconfiguration de l’Unité centralisée de préparation des chimiothérapies (UCPC) au sein du tout nouvel Institut d’oncohématologie. L’occasion d’une modernisation qui permettra à terme de doubler la production, explique Magdalena Ponseele, pharmacien responsable de l’UCPC.
Le réaménagement de la cancérologie vous a permis de repartir d’une feuille blanche pour optimiser la production ?
Oui, nous partions d’une unité ouverte en 2010. Or, on évalue normalement à 7-8 ans la durée de vie d’une telle unité sans évolution. De plus, elle était dimensionnée pour 15.000 préparations annuelles alors que nous en faisions 30.000 à notre départ fin 2020 ! Enfin, avec l’ouverture de la Maison de la cancérologie (rebaptisée Institut d’oncohématologie) permettant d’accueillir deux fois plus d’oncologues, il fallait nous projeter sur 15 ans. Avec deux facteurs antagonistes en termes d’activité : d’un côté, l’avènement des chimiothérapies orales tendant à réduire la production de poches ; de l’autre, celui des immunothérapies par voie injectable qui a contribué au doublement de notre production et qui sont promises à un essor considérable. Pour la nouvelle unité, nous avons ainsi situé le curseur à une capacité de production de 60.000 poches. L’UCPC était déjà centralisée dans le service de soins auparavant, mais nous sommes passés de quatre à six postes de manipulateurs répartis sur quatre isolateurs.
Comment pouvez-vous prévoir un doublement de l’activité en ne créant que deux postes de manipulation ?
En nous modernisant. Nous avons écarté la possibilité de robots de remplissage et de préparation qui sont très volumineux, or nous étions contraints en surface en raison du choix de conserver une unité dans la nouvelle Maison de la cancérologie. Nous avons opté pour un système de reconnaissance par vidéo couplée à une intelligence artificielle (le système Drugcam de la société Eurekam) qui donne au préparateur sur écran toutes les manipulations à réaliser étape par étape. L’IA reconnaît les flacons, la poche de solvants, les volumes des seringues et réalise le contrôle in fine. Ainsi, les préparateurs habituellement dédiés au contrôle des manipulateurs (un pour deux postes normalement) peuvent être redéployés. Le dispositif apporte aussi une sécurité et une tranquillité d’esprit en cas d’urgence ou d’astreinte de week-end, pour ceux qui ne sont pas habitués à ces traitements.
Ce dispositif numérique est-il synonyme de gain de temps ?
Oui et non… Oui, dans le sens où avant il fallait parfois attendre la disponibilité de l’aide-manipulateur pour contrôler une préparation. Non, car le temps de fabrication, lui, reste quasiment inchangé. Mais nous avons pu avancer par ailleurs dans la dématérialisation, le vidéo-contrôle réalisant et archivant automatiquement et de manière sécurisée sur serveurs dédiés les PDF des dossiers de production.
Par ailleurs, nous prévoyons la mise en place d’une application pour le contrôle final de l’administration. Les infirmières vont bientôt tester des terminaux permettant de “scanner le patient” d’un côté et la poche de l’autre, via un code datamatrix. Ceci dans le cadre du dossier patient informatisé.
Quel est le coût d’un tel système ?
Il faut compter 40.000 euros par poste de vidéo-contrôle. Sachant qu’il est possible de faire appel à la ligue contre le cancer pour obtenir des aides, voire à un industriel, comme MSD dans notre cas. Je ne m’avance pas beaucoup en vous disant que les prix des trois sociétés positionnées sur ce marché des isolateurs sont proches. Ce qui a fait la différence dans notre choix, ce sont les consommables et le budget maintenance.
Tous les types de traitements sont concernés ?
Oui, l’ARS nous a simplement demandé d’envisager un poste qui sera strictement réservé aux médicaments de thérapeutiques innovantes (à modification d’ARN). De fait, nous dédions déjà certains isolateurs aux productions d’immunothérapies d’un côté et aux chimiothérapies de l’autre. Même si, en théorie, un bionettoyage permet de passer d’une production à une autre.
La centralisation au sein du service facilite l’anticipation des préparations ?
Oui, cela fait un moment que nous pratiquons l’anticipation avec des prescriptions la veille ou l’avant-veille, et une activité lissée au maximum. Mais un patient pouvait quand même attendre sa poche 2-3 heures. Désormais, une poche peut être prête en 20 minutes en cas d’urgence (demande d’un médecin au bloc opératoire, par exemple). Il est clair que c’est notre proximité avec les prescripteurs et les patients au sein du service de soins qui permet cette réactivité et qui facilite la définition de paliers standardisés.
Propos recueillis par François Silvan